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dimanche 21 décembre 2014

Du soi à soi.


Parfois tu crois entendre quelque chose qui vient de toi, qui semblait t’appartenir il fût un temps, comme ton nom, ton identité, qui résonne d’en bas ou du haut des escaliers, mais il se trouve que, de moins en moins, tu perçois cette appellation, et que c’était peut-être quelqu’un d’autre, qu’on appelait, finalement, et que toi, tu es seulement resté à la même place, à la même désespérance, celle que l’on obtient par le poids des mois effilés qui forment, à un moment donné, sans que l’on s’en aperçoive, des années.
J’ai cru pouvoir te donner une substance, te confier mon écoute, mais il me semble que nous étions les mêmes, et que ce dont je te donnais, tu le recevais à la même seconde où l’on me donnait un espoir ; cet échange nous l’avons vécu telle une symbiose innommable, à laquelle aujourd’hui je n’ai plus de prise. Je te connais par ton cœur et ton âme, je sais que nous avions peu, mais que nous avons encore, cette énergie du vide, qui fait de nous une force que tu ne peux pas nier, et que nous ne refuserons pas encore, nous la traverserons, cette vague gigantesque, toujours, m’entends-tu ? Le sais-tu ? Ne dors plus en chien de fusil, sais, connais, nous ne partirons jamais.
J’ignore la trace exacte de ces pas que nous devrons encore parcourir, mais je connais, tout comme toi, le rythme qu’ils devront subir, mais je sais que tu te demandes si nous avons encore assez d’imagination, ce pouvoir alerte et habile qui est plongé en nous comme une bouée de secours toujours présente, et je te le dis désormais, il s’agit d’une étendue que tu n’aurais pas cru possible il y a quelques mois, pourtant nous l’avons déployé, nous avons bêché, travaillé à ces terrains de fond, ceux qui nous déportent de la réalité devenue insoluble, et malgré ce qui nous mine, nous avons déterré de l’or, et ce trésor nous mènera encore loin, quoiqu’il se passe, où que nous soyons, pour nous, pour d’autres.

Tu sais les gens s’éloignent. La certitude que l’on garde de les retrouver n’est que le leurre que l’on prolonge dans nos songes. Nous détenons cette emprise sur eux que par le biais, toujours mouvant, des scénarios parfois grotesques que nous développons chaque jour, pour conserver, à défaut de l’oubli dans lequel nous sommes devenus pour eux, leurs images, que nous façonnons à notre gré, faisant miroiter des réminiscences feutrées, d’encre et de fusain ; ne sont-ils pas devenus, tous ces gens que nous avons rencontrés et qui nous ont gommés, des personnages, ou bien est-ce toi, est-ce moi, est-ce nous, somme toute, ce personnage, fébrile, qui vibrons encore sous le dessin et le destin des jours ?
Je te parle encore, je te nomme, je t’ai vu tenir l’aube jusqu’au crépuscule avec des mains fragiles mais tenaces ; je t’ai vu détenir des aubes à portée de main et les faire grandir ; je t’ai vu retenir des larmes et le reste avec pudeur ; mais dis moi, quand vas-tu t’abstenir et rendre l’aube qui ne t’appartient plus ?
J’ai de la force encore pour fructifier nos rêves et songes et voir s’épanouir au fil des heures que tu créés des arbres toujours immenses, des chênes et que sais-je encore. Je regarde et j’ajoute de l’engrais à tes paysages de nature. Combien de routes allons-nous encore parcourir ensemble ? Avons-nous assez de réserves dans nos puits imaginaires ?


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